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Test du Nikon P950 , un bridge au zoom (presque) sans fin !
NIKON P950
Publié le 30/09/20
Rédigé par Aurélie Gonin
Qui oserait prétendre n’avoir jamais rêvé d’un objectif extrêmement long tout en étant petit, léger et bon marché ? Une chimère me direz-vous…Dans l’univers des DSLR et des caméras professionnelles assurément !
Mais il existe une catégorie d’appareils qui se targue de répondre à ce désir : les bridges, ces boîtiers relativement compacts et peu onéreux, qui affichent des zooms aux valeurs incroyables. Voilà des années que j’oscillais, vis-à-vis ce type de format, entre un snobisme et la curieuse envie de savoir ce que pouvaient réellement donner les valeurs annoncées. Pour pouvoir me faire une réelle opinion j’ai décidé de tester le Nikon P950.
Il s’agit d’un bridge donc, c’est-à-dire un appareil plus gros qu’un compact, mais un petit peu moins qu’un reflex, équipé d’une optique intégrée qui n’est donc pas interchangeable.
Si vous avez connu les caméscopes Handycam des années quatre-vingt-dix, on retrouve là à peu près le même volume, avec une ergonomie développée vers l’avant pour héberger un zoom conséquent. Pour ma part, j’avoue que c’est d’abord le choix de ce format qui me rebutait dans les bridges, car j’y voyais un appareil ni vraiment petit et léger comme peuvent l’être les compacts experts ou maintenant certains hybrides, ni assez gros pour offrir de réelles possibilités de prise de vue.
Dans ce cas précis on est sur des dimensions de 14 x 11 x 15 centimètres pour un poids d’un kilogramme. Cela reste bien entendu un petit gabarit, moins imposant qu’un DSLR et comparable à la plupart des hybrides, mais qui entre déjà dans la catégorie des appareils qu’on hésite à avoir tout le temps avec soi. Il semble toutefois pouvoir trouver sa place dans les bagages d’une famille en voyage ou dans le sac à dos d’un randonneur allant observer la faune sauvage.
Depuis une quinzaine d’années tous les fabricants proposent ce type de produits, pour satisfaire un public attiré par une caméra « à tout faire » facile d’utilisation, avec un gabarit qui les rassure sur le côté qualitatif par rapport à un tout petit compact (bien que ce critère soit sans doute de moins en moins valable). Si le modèle testé s’appelle P950, c’est bien parce qu’il est l’héritier d’une longue série de bridges que Nikon continue de faire progresser modèle après modèle.
À tous les niveaux, il ne faut sans doute pas comparer les bridges avec nos caméras habituelles, mais au contraire bien garder en tête, en manipulant ces boîtiers, que la cible de clientèle est l’amateur qui cherche la simplicité avant tout, ne débrayera jamais les automatismes et ne veut pas avoir à changer d’objectif tout en pouvant couvrir l’étendue de focales la plus grande possible.
Atout majeur des bridges : leur zoom
Peut-être avez-vous eu l’occasion de tourner avec le fameux objectif 50-1 000 mm de Canon et avez été impressionné par la plage ainsi couverte ? Et bien dites-vous qu’elle est courte en comparaison de celle d’un bridge ! Le P950 offre une optique allant d’un équivalent plein format 24 mm à un 2 000 mm, soit un zoom quatre-vingt-trois fois ! C’est insensé.
Si vous êtes lassé par les récurrentes questions des novices qui demandent quel est votre zoom à chaque fois que vous dégainez votre caméra, eh bien voilà votre arme ultime : le zoom imbattable. Pas étonnant que le volume et le poids soient relativement conséquents pour héberger un engin pareil, qui double en déploiement maximal, tout en restant bien sûr incomparablement plus réduit qu’un téléobjectif traditionnel.
À l’usage c’est fascinant de pouvoir se rapprocher à ce point de nos sujets et de s’essayer à des prises de vue habituellement inaccessibles. On pense bien sûr aux applications dans le genre animalier, qui nécessite habituellement un équipement extrêmement lourd et cher.
J’ai donc embarqué le P950 avec mon pied vidéo en montagne, sur un site que je sais être apprécié des bouquetins. Ce sont des bêtes peu farouches, mais avec lesquelles il faut néanmoins garder une certaine distance (comme pour toute la faune sauvage d’ailleurs). Je me suis donc installée un peu à l’écart d’un grand troupeau de mâles et me suis amusée à aller chercher des détails incroyables sur les animaux, que je n’avais jamais aussi bien vus auparavant.
Vous pouvez avoir une idée des capacités du téléobjectif en comparant l’image qui présente le site, dans lequel on distingue un grand mâle tout au fond sur un rocher, je dirais à une soixantaine de mètres de moi, et celle de son portrait. En focale maximale, on ne voit même plus ses cornes, sa tête tient à peine dans le cadre. Et si cela ne nous suffit encore pas, on peut cropper l’image pour une postproduction en HD car les vidéos sont enregistrées en UltraHD, ainsi qu’en photo avec des fichiers Raw et Jpeg de 4 608 x 3 456 pixels.
Cela ne vous étonnera pas, j’ai trouvé vraiment excitant d’aller chercher des détails et de faire de très gros plans de ces animaux sauvages. L’expérience se rapproche de la digiscopie, procédé dans lequel on couple une caméra à une longue vue pour pouvoir immortaliser ce que celle-ci nous donne à voir.
Dans un autre domaine, j’ai profité d’un épisode de lune rousse pour faire des images de la sortie de la pleine lune derrière des sommets. Encore une fois, le téléobjectif poussé à son maximum pour les besoins du test est presque trop long, puisque la lune tient à peine dans l’image ! Mais cela permet de distinguer des détails de sa surface que je n’aurais jamais pu voir avec ma gamme d’objectifs habituelle et que j’avais même l’impression de découvrir pour la première fois.
Un moment fascinant, qui fait toutefois partie des applications classiques du P950 puisque celui-ci dispose d’une fonction « lune » directement accessible sur la molette de choix de mode, avec des réglages pré-établis pour prendre ce sujet sans avoir à réfléchir à son exposition.
Outre ces possibilités de zoom extrêmes, qu’en est-il de la qualité des images ainsi enregistrées ? Je vous laisse juger par vous-même sur ces quelques exemples. Pour ma part, je trouve le piqué meilleur que ce à quoi je m’attendais pour un appareil de cette gamme, avec de bonnes restitutions des couleurs et gestion des contrastes.
Côté caractéristiques techniques, le P950 est équipé d’un capteur CMOS 1/2,3 pouce de 16,79 millions de pixels. Son objectif, qui équivaut à un 24-2000 mm pour un plein format, est donc en réalité un 4,3-357 mm. Il ouvre de 2,8 en grand-angle à 6,5 en téléobjectif. La plage de sensibilité étant limitée de 100 à 1 600 ISO, les possibilités de prise de vue en faible luminosité sont réduites, ce qui peut être un handicap pour l’animalier, la faune privilégiant généralement les déplacements au lever et à la tombée du jour. Mais il n’y a pas de secret : un téléobjectif très long et très lumineux est difficile à fabriquer et donc forcément bien plus cher qu’un bridge. Il faut comparer ce qui est comparable.
En compensation, l’appareil est équipé d’un stabilisateur optique pour les photos et fonctionnant par l’association de VR optique et électronique pour les vidéos. En utilisation sur pied cela génère des effets de vagues sur les images vidéo, un peu comme si un courant d’air chaud se trouvait entre le sujet et nous, à débrayer donc. L’utilisation d’un trépied de bonne qualité est à mon avis indispensable pour manipuler une optique de cette longueur, que ce soit pour de l’image fixe et surtout pour de l’image animée.
C’est un peu là-dessus que j’ai du mal à comprendre le principe même du bridge : qu’en fait vraiment un utilisateur néophyte ? On vient de le rappeler : on ne peut se passer d’un trépied correct, ce qui alourdit considérablement l’équipement. Quelle que soit la distance de prise de vue, il faut pouvoir gérer finement la mise au point. En mode macro la distance minimale est d’un petit centimètre, mais elle passe à cinq mètres à fond de télé.
L’autofocus fonctionne par détection de contraste, ce qui veut dire qu’il atteint rapidement ses limites en focale maximale. Le réglage de la mise au point manuellement est ainsi obligatoire, surtout quand on travaille avec des profondeurs de champ si réduites et qu’on a besoin d’être réactif pour suivre les mouvements d’un animal sauvage. Le viseur est convenable et le moniteur de 3,2 pouces satisfaisant, mais pour faire le point ainsi on doit tourner une toute petite molette sous l’index gauche.
Ce n’est pas impossible, mais ce n’est pas facile non plus. Et si on s’en sort avec des sujets placides comme les bouquetins ou la lune, ça devient très difficile pour des animaux plus furtifs. Je me demande donc quelles images peuvent réellement ramener de leurs safaris en Afrique ceux qui partent avec ce type d’appareil.
Pour conclure, je rappellerai que ce bridge vaut moins de neuf cents euros et pèse un kilogramme. Ce sont là les éléments à garder en tête quand on veut le confronter au matériel habituellement utilisé pour les images animalières ou astronomiques, car justement ces deux critères sont incomparables.
Pour quelqu’un qui serait attiré par la digiscopie je conseillerais de plutôt se tourner vers le P950. Mais pour les autres, je regarderais sans doute davantage du côté du Z50 et de son kit à peine plus cher : 16-50 mm + 50-250 mm (valeurs auxquelles il faut appliquer un coefficient 1,5 pour obtenir l’équivalent en plein format). Certes la longueur du téléobjectif est incomparable, mais l’usage quotidien est à mon avis plus agréable et l’image plus qualitative. À chaque caméra ses détracteurs et ses adeptes, et c’est très bien ainsi.
Article paru pour la première fois dans Moovee #4, p.8/10. Abonnez-vous à Moovee (6 numéros/an) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.